Le procès de l’ancien ministre Oswald Homéky et de l’homme d’affaires Olivier Boko, ouvert ce mardi devant la Cour de Répression des Infractions Économiques et du Terrorisme (CRIET), s’est transformé en véritable bras de fer entre la défense et la Cour. Au cœur des tensions, la composition de la juridiction et des accusations d’irrégularités qui ont conduit les avocats à se retirer du dossier, laissant leurs clients seuls face à leurs juges.
Une Cour controversée : la défense dénonce une composition irrégulière
Dès l’ouverture de l’audience, la défense a mis en cause la régularité de la composition de la Cour, estimant qu’elle devait comporter cinq membres au lieu de trois, comme l’exige l’article 254 du code de procédure pénale. Pour le procureur spécial de la CRIET, Mario Mètonou, cette configuration repose sur une pratique établie et justifiée par le manque de magistrats. Une explication rejetée par les avocats des accusés, qui ont souligné que « la pratique ne peut pas primer sur la loi ».
Me Balley, l’un des avocats, a insisté sur le fait que « le pouvoir du juge n’est que celui de la loi », une position partagée par Me Kato Atita. Face à ces critiques, la présidente de la Cour a suspendu l’audience pour délibérer, mais à la reprise, elle a confirmé la régularité de la composition actuelle.
Un climat de méfiance et des accusations graves
Cette décision a provoqué la désapprobation de la défense. Me Ayodélé Ahounou a dénoncé une violation manifeste du droit, tandis que Me Timothée Yabit a fustigé une procédure qu’il juge inéquitable à chaque étape. « On nous demande de jouer un match en entrant à la 84ᵉ minute. L’équité a été bafouée », a-t-il déclaré, ajoutant que « ce procès semble être une formalité pour confirmer une condamnation déjà décidée ».
Les avocats ont également remis en cause l’impartialité de la présidente de la Cour, qu’ils estiment proche du pouvoir, avant de se retirer officiellement de la défense en dénonçant des « conditions impossibles » pour continuer à plaider.
Un renvoi critiqué par les accusés
Face à cette situation, la Cour a décidé de renvoyer le procès au mercredi 22 janvier 2025. Une décision que les accusés, désormais sans avocats, ont vivement contestée. Pour Olivier Boko, ce délai est insuffisant pour constituer une nouvelle équipe de défense : « Nous avons besoin de temps pour désigner de nouveaux avocats. Ce n’est pas possible de le faire pour demain. »
Oswald Homéky, de son côté, a évoqué les difficiles conditions de détention : « Nous sommes emprisonnés 24 heures sur 24, sans voir le soleil, sans possibilité de nous promener ou de faire du sport. Nous souffrons sincèrement. »
Des enjeux politiques en toile de fond
Ce procès, qui cristallise les tensions politiques et judiciaires au Bénin, pose des questions fondamentales sur le respect des droits des accusés et l’indépendance des institutions judiciaires. La décision de la Cour de maintenir la date de reprise du procès, malgré les objections des accusés, risque d’alimenter davantage les critiques sur la gestion de ce dossier sensible.
Alors que les regards sont braqués sur cette affaire, l’issue de ce procès sera un test majeur pour l’équité de la justice au Bénin. Les prochaines audiences s’annoncent déterminantes pour l’avenir des deux accusés et pour la crédibilité du système judiciaire du pays.