Près de 30 ans après avoir été envisagée, le Ghana a enfin adopté une loi historique sur l’égalité des genres, marquant un tournant dans la promotion des droits des femmes. La loi, promulguée par le président Nana Akufo-Addo à quelques mois des élections présidentielles de décembre, vise à garantir une plus grande représentation des femmes dans les sphères décisionnelles.
Appelée « loi sur l’action positive et l’égalité des genres », elle exige que d’ici 2030, au moins 50% des postes dans la fonction publique et les organes de décision soient occupés par des femmes. Actuellement, les femmes ne représentent que 15% des parlementaires. La loi s’étend également au secteur privé, qui devra instaurer des quotas féminins en échange d’avantages fiscaux, une mesure essentielle selon la Banque mondiale, qui indique que seulement 27% des postes de direction sont occupés par des Ghanéennes.
Pour Celestine Damoah, du Centre pour la démocratie et le développement socio-économique, « cette loi est bien plus qu’un texte législatif, c’est une clé pour libérer le potentiel des femmes ». Cette adoption, fruit de longues années de débat parlementaire et de résistances, représente un pas vers une société plus inclusive.Les deux principaux partis politiques ghanéens, le NPP et le NDC, avaient tous deux fait de l’égalité des genres un pilier de leurs programmes électoraux. Le NDC propose une banque de développement pour les femmes, tandis que le NPP mise sur un Fonds d’autonomisation pour soutenir les entreprises féminines.Cependant, malgré l’enthousiasme suscité par cette avancée, des doutes subsistent sur sa mise en œuvre concrète.
Le Ghana reste une société conservatrice, où les violences conjugales persistent, affectant 38,7% des femmes mariées, selon un rapport de 2016.Pour Rodaline Imoru Ayarna, militante de l’Alliance pour le changement révolutionnaire, il faudra davantage que des lois pour changer les mentalités. « Il reste un long chemin à parcourir pour que les femmes soient perçues comme égales aux hommes dans le milieu professionnel », insiste-t-elle.Sheila Minkah-Premo, avocate et militante des droits des femmes, partage cet avis. Elle appelle à une éducation dès l’école pour sensibiliser à l’égalité des sexes, soulignant que « les normes et valeurs culturelles profondément ancrées » constituent un frein majeur à l’évolution des mentalités.Enfin, Shamima Muslim, de l’ONG Alliance pour les femmes dans les médias en Afrique, insiste sur l’importance de « mettre en œuvre la loi de manière concrète ».
Cette adoption s’inscrit dans un contexte où une autre loi controversée, sur les « valeurs familiales », suscite de vifs débats au Ghana. Axée sur la restriction des droits des personnes LGBT+, cette loi, adoptée par le Parlement, attend encore la signature du président.