À moins d’un an de l’élection présidentielle camerounaise prévue pour octobre 2025, une fronde inédite émerge du clergé catholique. Lors des homélies du Nouvel An, plusieurs évêques ont exprimé publiquement leurs inquiétudes face à la situation politique du pays, gouverné depuis 42 ans par le président Paul Biya. Ces prises de position témoignent d’un profond malaise au sein de la société camerounaise et d’une volonté de changement.
L’archevêque de Douala, Samuel Kléda, a ouvertement appelé Paul Biya à quitter le pouvoir. Lors d’une interview accordée à un média français, il a plaidé pour une transition pacifique, affirmant qu’une nouvelle candidature du président, âgé de 92 ans, serait “irréaliste”. Pour lui, l’avenir du Cameroun nécessite un renouvellement à la tête de l’État et une prise en compte des aspirations populaires.
Cette prise de position a été largement relayée et soutenue dans les églises du pays. À Yagoua, l’évêque Barthélemy Yaouda Hourgo a pris la parole avec une rare véhémence, dénonçant la souffrance du peuple camerounais. Son sermon, largement partagé sur les réseaux sociaux, illustre l’exaspération grandissante face à une situation politique jugée insoutenable. Les mots de l’évêque ont résonné comme un appel à la justice sociale et à une réforme profonde.
De son côté, à Ngaoundéré, Monseigneur Emmanuel Abbo a dénoncé la répression des voix dissidentes par le régime en place, qualifiant l’État de “rouleau compresseur” qui étouffe toute expression de mécontentement. Il a particulièrement critiqué l’interdiction faite aux Camerounais d’exprimer leurs frustrations, s’interrogeant sur l’avenir d’un pays où la parole est muselée.
Face à ces critiques croissantes, le président Paul Biya est resté impassible. Dans son discours du 31 décembre, il a réaffirmé sa “détermination à servir”, tout en remerciant ses compatriotes pour leur “soutien massif”. Cependant, il n’a pas précisé s’il se porterait candidat pour un nouveau mandat lors de l’élection présidentielle.
Les déclarations des évêques mettent en lumière une fracture profonde entre la classe politique dirigeante et les préoccupations populaires. Bien que ces critiques ne représentent pas encore la position unanime de l’Église catholique au Cameroun, elles signalent une rupture symbolique significative. Certains membres du clergé continuent de soutenir le régime, mais l’appel à un changement politique porté par une partie du haut clergé pourrait avoir des répercussions majeures sur la mobilisation citoyenne.
Cette situation reste à surveiller de près, alors que les tensions politiques et sociales continuent de croître dans le pays.